184'000 signatures en deux semaines pour rendre les multinationales responsables de leurs acte !
"Rendre responsable", décidément, c'est bien le mot qui convient
En mai 2024, l'Union Européenne adoptait une
directive sur la responsabilité des multinationales. Elle
s'applique à tous les pays membres de l'UE : elle oblige les
pays membres de l'UE à introduire d'ici l'année prochaine des
lois imposant aux multinationales qui y sont établies de rendre
compte de leur respect ou de leur irrespect des droits humains
et des normes environnementales dans leurs activités et à
réduire leurs émissions nocives au climat. Des lois nationales
sur la responsabilité des multinationales sont d'ailleurs en
vigueur, ou des procédures judiciaires nationale en cours, en
France, Grande-Bretagne, Italie, Allemagne, Pays-Bas et Norvège.
Il y a cinq ans, la Suisse se prononçait sur une initiative
populaire allant dans le même sens que les lois nationales ou la
directive que ses voisins ont adoptées. Le peuple avait accepté
l'initiative, mais une majorité des cantons l'avaient refusée.
L'un des arguments avancés par les multinationales, le Conseil
fédéral et les partis de droite pour inciter à la refuser était
que la Suisse ne pouvait pas se permettre de faire "cavalier
seul" en adoptant des normes que ses voisins n'avaient pas
adoptées. Or désormais, c'est la Suisse qui fait "cavalier seul"
en n'adoptant pas les mêmes normes que tous ses voisins -et une
vingtaine d'autres pays européens -ce qui fait d'elle une
concurrente déloyale de ses voisins et partenaires européens. Et
bien que la Suisse héberge de nombreuses
entreprises internationales et qu’elle joue un rôle déterminant
dans le commerce mondial de matières premières, la discussion
sur leur responsabilité stagne.
Le Conseil fédéral, malgré sa promesse, n'a pas
lancé de processus législatif pour une loi sur la responsabilité
des multinationales mais s'est contenté de mettre en
consultation une réformette cosmétique sur le reporting des
grandes entreprises. Qui pourront continuer d'affirmer, sans
preuve (et malgré le nombre et la lourdeur des preuves
inverses), mais en couleurs sur blanc dans des brochures
décoratives, qu'elles font tout ce qu'il faut pour ne nuire à
personne. La Suisse est ainsi le dernier pays d'Europe (hors la
Russie, la Biélorussie, l'Albanie et les Etats issue de
l'ex-Yougoslavie) à laisser des multinationales établies chez
elles polluer l'eau et l'air, détruire des cultures vivrières,
appauvrir des populations autochtones, sans avoir aucun compte à
rendre mais seulement des discours autojustificateurs à tenir.
On lira ainsi de Lindt & Sprüngli qu'elle évite le travail
des enfants "lorsque c'est possible". Mais bon, hein, si ce
n'est pas possible, on fermera les yeux. On lira de Metalor
l'affirmation que tous ses fournisseurs respectent les droits
humains. Même ceux de ces fournisseurs qui gèrent des mines dans
lesquelles des dizaines de travailleurs sont morts. Et on lira
de Glencore qu'elle n'a relevé aucun cas de violation des droits
humains ni aucun cas de pollution de l'environnement. Comme dans
la mine péruvienne Antapaccay de Glencore ce qu'on ne veut pas relever ne sera pas
relevé.
Les multinationales suisses, comme les autres, exploitent hommes, femmes et enfants, nature, et environnement, violent les droits fondamentaux, expulsent les peuples indigènes. Mais contrairement à leurs consoeurs européennes, elles n'ont as de comptes à rendre, et les majorités politiques gouvernementales de ce pays ne veulent pas qu'elles en rendent. Les initiants n'excluent pas de retirer leur texte si la loi qu'ils souhaitent était votée -ce à quoi évidemment les multinationales sont férocement opposées, et la majorité de la droite aussi, à leur suite et leur service. C'est à leur inactivisme, à leur cécité volontaire, à leur complicité même, que l'initiative répond. Et c'est une réponse souhaitée, selon un sondage de juin-juillet 2023, par 70 % de la population suisse.
Les
multinationales développent leurs
activités hors des limites de l'Etat
où est implanté leur siège, mais dans
cet Etat, elles sont soumises à ses
lois. Il y a donc une double nécessité
à laquelle répondre si on entent
encadrer, si peu que ce soit, leur
activité : celle d'un cadre national
et celle d'un cadre aussi
multinational qu'elles. Ce cadre
international ce sont, formellement,
les Etats qui le négocient entre eux.
Nous disons ici "formellement", parce
qu'on sait bien que les
multinationales sont totalement
impliquées dans ces négociations, et
qu'elles y ont le pouvoir de peser sur
les Etats, même les plus puissants :
leurs chiffres d'affaires, leurs
bénéfices, leurs profits dépassent de
loin les ressources, et le
nombre d'emplois
dépendant d'elles le
nombre d'habitants, de
la plupart
des Etats. Pourtant, l'Union
Européenne et nombre de ses Etats
membres ont légiféré pour rendre les
multinationales responsables de leurs
actes. L'UE et ses Etats, pas la
Suisse.
"Rendre responsable", décidément, c'est bien le mot qui convient, quand ce sera au peuple de rendre l'Etat et les multinationales responsables de leurs actes.
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