On n'est plus Conseiller municipal... et alors ?
On n'est plus Conseiller municipal... et alors ? On a quitté hier soir, comme d'autres, le parlement de la Ville de Genève. On y a sévi seize ans, et au bout de seize ans de bons ou mauvais, loyaux ou déloyaux services, il faut bien aller voir ailleurs si on peut y être politiquement actif. Et on peut l'être. Et on sait l'être. On l'a d'ailleurs été pendant bien plus longtemps que le temps passé à sévir au Conseil municipal. Etre ou ne pas être Conseiller municipal, ou député, ou quoi que ce soit qui y ressemble, là n'est pas la question. La question est : Etre ou ne pas être dans la Cité. Et le Conseil municipal n'est pas la Cité. Le Conseil administratif non plus d'ailleurs. La cité, la Polis au sens grec, la Civitas au sens romain, c'est l'agora, le forum. La rue.
Et tout cela peut se résumer en quatre mots : VIVE LA COMMUNE, BORDEL !
Il y a une vie politique hors des institutions politiques
Etre au parlement, pour un parti ou une coalition de groupes politiques, mais aussi pour un militant politique, est-ce indispensable ? Non, évidemment. Ce n'était indispensable ni pour moi, ni pour mes camarades -ni pour mes collègues. On est là, j'espère, parce qu'on pense qu'on peut y être utile à des prises de décisions utiles -et politiquement légitimes. Mais on sait bien aussi qu'utile, on peut l'être ailleurs que dans un parlement. Et que comme disait le camarade Ecclésiaste, il y a un temps pour tout. J'ai siégé dans ce Conseil pendant seize ans, sans interruption : trois mandats entiers plus deux ans comme "vient ensuite". ça passe vite, seize ans, et pourtant c'est long. On risque au bout de deux ou trois mandats de rabâcher, de se conformer, de fonctionner à l'habitude -qu'on va évidemment déguiser en expérience. N'ayant jamais siégé ailleurs que dans ce Conseil, je prétend y avoir toujours défendu des positions socialistes. Y compris quand je les ai défendu contre le Parti et le groupe socialistes, ce parti ni ce groupe n'étant pas plus propriétaires du socialisme que le PLR du libéralisme et du radicalisme, le MCG de la citoyenneté genevoise, l'UDC de la démocratie, les Verts de la verdure, les verts libéraux de la verdure libérale et du libéralisme vert, les centristes des centres et Ensemble à Gauche de la gauche.
Le PS a établi la règle d'une limitation à trois
mandats consécutifs de ceux à quoi on peut prétendre, et c'est
une excellente chose. Il a aussi renoncé à prévoir une
dérogation possible à cette limitation, et c'est une autre
excellente chose, parce que c'est la condition pour qu'une règle
soit vraiment une règle, et pas seulement une posture proclamatoire. Il a enfin prévu une règle de non cumul des
mandats, et cela aussi, c'est une excellente chose, parce que ça
évite les mélanges de casquettes, les confusions
de discours et les incompatibilités de prises de position.
La gauche a perdu, pour deux sièges, la majorité
au Conseil municipal de la Ville de Genève. Perdre une majorité
parlementaire, est-ce grave ou n'est-ce qu'une péripétie ? Les
parlements prennent des décisions, les
législatifs votent des lois, les délibératifs accordent des
moyens. Les lois ont des effets, les moyens peuvent être
utilisés. Etre absents de ces lieux, ou y être minoritaires,
c'est renoncer à pouvoir peser sur ces effets, renoncer à
pouvoir disposer de ces moyens ou en faire disposer d'autres.
Mais c'est surtout, si on ne veut pas baisser les bras et
continuer à lever les poings, s'obliger à user d'autres moyens,
ceux qui permettent de contourner une majorité hostile aux
parlements municipal. cantonal et fédéral ou aux gouvernements
cantonal et fédéral. On sait le faire, et on le fera.
Il y a une vie politique hors des institutions politiques. Ces institutions, d'ailleurs, naissent hors d'elle-même -dans la rue, précisément : il a fallu tout de même une révolution à Genève pour que Genève redevienne une commune. Une des cinq révolutions que Genève ait faites -et, pour une d'entre elle, défaites. Quitter un parlement (puisque le CM est un parlement), ce n'est quitter qu'un lieu parmi d'autre, un terrain parmi d'autre, et pas le plus important, du combat politique. C'est renoncer à un moyen d'action politique, ce n'est pas renoncer à l'action politique. On reste citoyen, on reste militant. On ne plus déposer de motion ? On peut déposer des pétitions. On ne peut plus déposer de projet de délibération ? On peut lancer des initiatives. On ne peut plus s'opposer à des projets de délibération ? On peut lancer des référendums.
Hors des institutions de la démocratie semi-directe, il y a la démocratie directe (les référendums, les initiatives, les pétitions)... et l'imagination politique sans entrave : y soyez attentifs, l'Ouvroir de politique potentielle, le Collège de patapolitique et le Grand Dugong qui les inspire y pourvoiront, dès la rentrée de fin août.
Commentaires
Enregistrer un commentaire