Fonds de tiroir

 On failli oublier: y'avait une élection dans le Jura (encore) bernois. Une élection à la préfecture. A laquelle la préfète sortante, la PLR Stéphanie Niederhauser, se représentait pour un troisième mandat. Elle n'était contestée par aucun parti de la région. Elle aurait donc du être tacite. Sauf qu'un groupuscule d'extrême-droite lau-sannois, le «Rassemblement romand patriote» (RRP) avait envie qu'on sache qu'il existe. Et qu'il a donc présenté une candidature. Celle d'un lausannois (ben ouais, la loi bernoise n'impose pas qu'on soit résident bernois pour être préfet dans le canton), un incertain Bruno Dupont. Dupont avec t. Election il devait donc y avoir. Et avec une participation de 28,2 %, c'est la préfète qui a été réélue avec 9366 suffrages contre 493. En gros, 95 % des suffrages contre 5 %. Il y a donc presque 500 connards dans le Jura bernois qui n'ont pas été gênés par les échanges racistes, antisémites et misogynes sur le groupe WhatsApp du RRP. Moutier a eu bien raison de quitter le Jura encore bernois pour rejoindre le Jura jurassien...

Le 18 mai, Genève a accepté à 71,67% des suffrages de confier au Grand Conseil le droit, jusque-là détenu par le peuple, d'élire les juges suppléants, assesseurs, les procureurs extraordinaires issus d'autres cantons et les juges de la Cour d'appel du pouvoir judiciaire. Et tout le monde est content. Sauf un citoyen qui a fait recours auprès de la Cour Constitu-tionnelle de la Cour de Justice, contre la loi soumise au vote et contre le résultat du scrutin, parce que selon lui, la brochure officielle présentant les objets soumis en votation ne donnait pas assez d'explications.  Donc la Justice va traiter du mode d'élection d'une partie du pouvoir judiciaire. Le premier qui dit que la séparation des pouvoir est un principe fondamental de la démocratie a gagné un volume des oeuvres complètes de Montesquieu.

Aux larmes, citoyens ! selon une étude amerloque de 2023, deux tiers des jeunes hommes (ou post-adolescents) de 18 à 23 sont célibataires et souffrent de solitude, se disent déprimés et se replient dans un monde virtuel. Et un célibataire sur cinq, et un moins de 30 ans sur quatre, dit n'avoir aucun ami proche. Et cette solitude masculine toucherait aussi la Suisse, selon une étude du Centre de compétence suisse en science sociale : 66% des jeunes hommes ou post-adolescents de 18 à 25 ans et 20% des hommes de 26 et 44 ans sont célibataires (contre 40 et 12% des jeunes femmes des la mêmes tranches d'âge). Faut s'en alarmer ? Bof... être célibataire, ça peut être un choix, non ? Et puis, dans la tranche d'âge «jeune», il y a plus de garçons que de filles, donc forcément, mécaniquement, plus de célibataires (sauf polyandrie). Et plus d'hommes que de femmes dans la population immigrée. Et les curés sont forcément célibataires.  Mais les spécialiste de ce douloureux sujet (le célibat des zoms) ajoutent que 80% des femmes utili-satrices de Tinder continuent à pré-férer les hommes grands, sportifs, aisés et instruits. Autrement dit, frères humains, si vous êtes petits, feignants, pauvres, incultes et moches, modèle Beauf de Cabu, faut pas vous étonner de rester célibataires. Et on s'étonnera pas que vous deveniez misogynes. Et qu'à 25 ans, vous restiez habiter chez vos parents. Bien fait pour eux, zavaient qu'à pas copuler (verbe tiré du substantif couple)...

On a déjà témoigné avoir passé un bon dimanche, le 18 mai, avec, outre la fin de la daube eurovisuelle, le naufrage de la daube fiscale udéciste. On peut ajouter à ces petits plaisirs dominicaux quelques résul-tats électoraux et référendaires: le refus à Zurich d'une réduction d'impôt sur le bénéfice des entrep-rises, combattue par un référendum de la gauche, et les défaites des candidats de la droite de la droite en Pologne et en Roumanie. Bon, évidemment, toutes les urnes n'ont pas accouché de résultats aussi satisfaisants: au Portugal, l'extrême-droite a dépassé les 20 % de suffrages et talonne l'opposition socialiste au gouvernement de droite. Ouais, ben finalement, on a bien fait de laisser le champagne au frais, on le boira une autre fois.

C'est pas parce qu'on quitte le Conseil municipal de la Ville de Genève que la Ville cesse de s'occuper de nous: on a reçu une gentille lettre de notre Maire préférée, Christina Kitsos, qui nous présente les mesures prises pour nous «aider à traverser» l'été. C'est bien, on avait d'ailleurs l'intention de le traverser, l'été. Alors, Christina elle nous recommande de «maintenir des liens avec (nos) voisines et voisins» (vu qu'on risquerait de les perdre avec nos collègues du Conseil munici-pal ?), et nous annonce qu'on pourra aller gratuitement à la piscine et au cinéma (aux Scala, City et Nord-Sud) l'après midi «avec un proche», et prendre le frais dans les espaces climatisés de la Cité Seniors, du Musée d'ethnographie et dans une vingtaine de «cafétérias conviviales» d'EMS. Et même, la Ville nous dit ce qu'il faut qu'on fasse en cas de canicule : porter des vêtements clairs et amples, réduire l'activité physi-que, prendre des douches, se mettre des linges humides sur le front et la nuque et des compresses froides sur les bras et les mollets, fermer les stores et les volets durant la journée, aérer durant la nuit, chercher la fraîcheur à l'extérieur aux heures les moins chaudes de la journée, boire au minimum un litre et demi d'eau par jour même sans avoir soif, manger des aliments riches en eau et donner des nouvelles régulières aux proches. Euh... alors, faut carrément changer de mode de vie pour pas cuire, c'est ça ?

En novembre dernier, 4500 personnes ont signé un appel du «Courrier» aux élus, aux politiques et aux col-lectivités, dont à nous et à la Ville,  à sauver la presse locale. Elles ont signé un appel qui proclame que l'in-formation «n'a jamais eu autant de valeur» mais qu'elle est «plus que jamais en danger», que l'«appauvris-sement de l'information» est un appauvrissement du débat démocra-tique. Nous avons («nous», c'est, évi-demment la gauche du Conseil muni-cipal...) déposé une motion deman-dant au Conseil administratif de poursuivre l'action qu'il avait déjà engagée en faveur de la presse, de la renforcer et d'étudier quelques uns des moyens que suggérait l'appel lancé en novembre. Nous demandions au Conseil municipal de voter «sur le siège» sans renvoi en commission, de cette motion. Ce qui justifiait cette demande, c'était précisément l'urgen-ce d'un soutien à la presse locale. La presse, par définition, c'est l'imprimé. La presse locale, ce sont donc les jour-naux locaux. Et c'est ce secteur des media qui est le plus menacé, non pas tant par les raisons qu'invoquent les grands groupes pour les affaiblir encore que par les politiques de fusion et de, pour reprendre la terminologie de l'éditeur de Tamedia, la «mue numérique». La «presse écrite» pour user d'un pléonasme, est consub-stantielle à la démocratie, la presse et la démocratie se sont développées ensemble, il n'y a pas de démocratie sans liberté de la presse -et évidem-ment pas de liberté de la presse sans presse... La droite du Conseil municipal a fait semblant de l'admettre. Pour refuser de le voter sans traîner, et renvoyer, avec l'aide des Verts, ce texte simple en commission. Où il moisira le temps de devenir une oraison funèbre pour un ou deux quotidiens genevois.




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