La nouvelle "législature" municipale genevoise s'est ouverte
La gauche, la droite, toujours...
Le nouveau Conseil municipal de la Ville de Genève
est entré en fonction le 1er juin. Pour deux sièges, la droite
(tous groupes ajoutés), ou plutôt la "non-gauche" (comme dit le
MCG), y est majoritaire. Le parti de Maudet, "Libertés et
Justice Sociale" (LJS) n'a pas (mais de peu) réussi à y entrer,
contrairement aux Verts libéraux qui n'y ont réussi qu'en
faisant liste commune avec le Centre. Le recul des Verts permet
au PLR de se consoler de son propre recul (il a perdu deux
sièges) en redevenant le deuxième groupe (ex-aequo avec les
Verts, justement) du Conseil municipal. L'UDC et le MCG gagnent,
ensemble, trois sièges, dont on peut parier qu'ils ne feront pas
grand'chose. La petite majorité de droite tient donc à la
progression de l'extrême-droite, à la fusion électorale du
Centre et des Verts libéraux et au fort recul des Verts. A
gauche, les Verts ont perdu six sièges et le PS en a perdu un,
mais Ensemble à Gauche & Union Populaire en a gagné deux,
tout en faisant un moins bon résultat en suffrages que celui
obtenu sur deux listes séparées en 2020 (10,14 % contre 11,94
%). Reste à savoir ce que les uns et les autres, la gauche et la
droite (ou la non-gauche) sauront faire de ce rapport presque
égal des forces -qui d'ailleurs tient plutôt, en Ville depuis
quarante ans de la règle : une gauche majoritaire à l'exécutif,
une droite majoritaire au délibératif (sauf exceptions) mais se
révélant généralement incapable de faire quoi que ce soit de
décisif de cette majorité, le peuple restant un arbitre que la
gauche ne s'est jamais privée de solliciter...
Relever les vrais enjeux, bien lourds, bien clivants entre la gauche et la droite,
"Siéger ne serait-ce qu'au Conseil municipal d'une
des villes les plus riches au monde n'est pas un luxe dont la
gauche radicale peut se passer", écrivait SolidaritéS avant les
élections. Elle ne s'en passera donc pas -et c'était d'ailleurs
aussi un besoin pour la gauche toute entière... L'élection du
Conseil municipal de la Ville de Genève a confirmé un solide
clivage gauche-droite : si les candidates et candidats PS,
Vert.e.s et PLR au Conseil administratif, têtes de leurs listes
au Conseil municipal, ont obtenu un nombre appréciable de
suffrages du camp adverse au leur, les pourcentages de suffrages
obtenus par chaque parti sur des listes d'autres partis (par
l'ajout sur la liste du parti de candidate d'autres partis)
n'atteint que 1,6 % si on ne tient compte que des suffrages en
provenance du camp politique adverse (de la droite sur les
listes de gauche, de la gauche sur les listes de droite).
"Que peut faire la Ville de Genève dans la période actuelle qui conjugue augmentation du coût de la vie, catastrophes climatiques, menaces de l'extrême-droite, poussées impérialistes et militaristes ou encore attaques contre les droits des femmes et contre les personnes LGBTQIA+ ?", s'interrogeait SolidaritéS avant les Municipales genevoises... Une bonne question à tiroirs, à laquelle on ne peut se contenter de répondre "pas grand'chose, vu les compétences municipales réduites à Genève". Parce que la capacité d'une ville à mener la politique qu'elle entend mener tient moins à ses compétences légales qu'à un double rapport de force : celui entre la gauche et la droite dans les instances de la ville, et celui entre la ville et le canton (et la Confédération). C'est un des pères fondateurs du libéralisme politique, Tocqueville, qui le rappelle : "C'est dans la commune que réside la force des peuples libres", mais "parmi toutes les libertés, celle de la commune, qui s'établit si difficilement, est aussi la plus exposée aux invasions du pouvoir". Aux invasions, et aux prédations : le canton, jamais à court d'idées de ce genre, entend puiser des dizaines de millions de francs dans les budgets des communes pour payer 20 % de sa propre contribution à la péréquation fédérale...
Comme nous, la gauche de la gauche considère que
la commune est un contre-pouvoir indispensable, face à la droite
et à l'extrême droite majoritaire au Grand Conseil. Elle avait fait campagne avec une liste unique et sur
quatre thèmes principaux pour "une ville populaire, écologique
et sociale" : le renforcement des services publics, la lutte
contre la gentrification de la ville, l'accessibilité
universelle aux prestations sociales et la lutte contre le
changement climatique. Sur ces thèmes, elle avance des
revendications précises (qu'elle partage pour la plupart avec
les socialistes, et généralement aussi avec les Verts), comme le
renforcement des prestations complémentaire municipales avec une
treizième rente, la gratuité du parascolaire et des cuisines
scolaires. De vrais enjeux à relever, bien lourds, bien clivants
entre la gauche et la droite, bien constitutifs d'un programme
de gauche.
Bien plus en tout cas que l'augmentation des jetons de présence des conseillers municipaux ou la répartition des sièges dans les commissions. Mais bon, on dit ça, on dit rien, hein...
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