Les habits neufs du président Xi
Le 31 août et le 1er septembre s'est tenu à Tianjin le sommet de l'Organisation de coopération de Shanghai (OCS), suivi mercredi matin à Pékin d'un gigantesque défilé militaire pour le 80e anniversaire de la capitulation du Japon au terme de la Guerre Mondiale : La Chine de Xi Jinping, et Xi lui-même, font étalage de diplomatie et de puissance, favorisé dans cette exposition par les errements de Trump. A Tianjing, frais comme un gardon de 72 ans dans ses habit neufs, Xi a accueilli Vladimir Poutine, Kim Jong-un et le Premier ministre indien, Narenda Modi (qui n'était pas du défilé militaire), 23 autres chefs d'Etat et de gouvernement, dont quelques européens (l'inévitable biélorusse Loukatchenko, par exemple), les responsables d'une dizaine d'organisations internationales et régionales, dont le Secrétaire général de l'ONU, sans oublier une masse de figurants dont l'ancien Conseiller fédéral UDC Ueli Maurer. L'OCS, c'est une galaxie plus qu'une alliance, mais elle regroupe entre un tiers et la moitié de la population mondiale, et pèse plus du quart du PIB mondial. Impossible à ignorer. Et dangereux à provoquer. C'est le moment de ressortir de dessous la table bancale qu'il calait le vieux Alain Peyrefitte ("Quand la Chine s'éveillera", comme disait Napoléon), de notre bibliothèque l'incontournable Simon Leys ("Les habits neufs du président Mao"), et de nos archives le petit livre rouge des pensée de Mao. On peut même y ajouter Lao Tseu et Sun Tzu : On a le temps de les lire tous, qu'ils aient ou non une réalité historique -d'ailleurs, Xi espère qu'"au cours de ce siècle il sera possible de vivre 150 ans"...
"La noble cause de la paix et du développement de l'humanité triomphera assurément"
De tous les chefs d'Etat et de gouvernement réunis la semaine dernière par Xi Jinping à Tianjing pour le sommet de l'Organisation de Coopération de Shanghaï et à Pékin pour un gigantesque défilé militaire, et de tous les Etats qu'ils représentent, Xi et la Chine sont, sans conteste possible, le poids lourd et la grande puissance seule capable à elle seule de faire face aux USA, celle dont les autres ont pour y faire face aussi besoin du soutien, sous quelque forme qu'il se fasse. Même l'Inde a ce besoin de la Chine -alors qu'il y a cinq ans les deux Etats s'affrontaient militairement sur leur frontière. Aujourd'hui, après les 50 % de textes imposées par Trump aux exportations indiennes vers les USA, Xi peut appeler la Chine et l'Inde à une "danse du dragon et de l'éléphant", et son ministre de Affaires étrangères proposer que la Chine réponde aux besoins indiens en métaux rares. Et la Chine attend l'inde sur les "nouvelles routes de la Soie"... Au passage (obligé), l'OCS condamne "fermement les actes causant des victines civiles" à Gaza, et les frappes américaines et israéliennes en Iran.
Xi l'a joué apaisant lors du sommet (mais nettement moins lors du défilé militaire), en n'évoquant qu'indirectement les USA, Taïwan ou les taxatrump, en plaidant pour une gouvernance mondiale "plus juste et raisonnable", contre "la mentalité de guerre froide, la confrontation entre blocs et (les) comportement intimidants", en exhortant à "soutenir le système commercial multilatéral" avec l'OMC et à défendre un monde "multipolaire égalitaire et ordonné". Les habits neufs du président XI sont ceux d'un grand leader sur qui, assure-t-il, on peut compter pour agir rationnellement, pragmatiquement, pacifiquement -pas un agité comme le candidat au Prix Nobel de la Paix. Il a annoncé que la Chine fournira en 2025 aux Etats membres de l'OCS une aide de 2 milliards de yuans (240 millions d'euros) et 10 milliards de yuans (un milliard d'euros) de prêts, leur construira un centre d'intelligence artificielle et les a invite à participer à la future station permanente de recherche lunaire.
"La renaissance de la nation chinoise est inarrêtable" a proclamé Xi. Et "la noble cause de la paix et du développement de l'humanité triomphera assurément". D'ailleurs, les causes de la Chine, de la paix, du développement, et du dialogue, sont indissociables. Qui pourrait en douter, sinon, précisément, les ennemis de la paix et du développement, ce qui, définitivement, les désignerait comme tels ? "Si nous sommes attaqués par l'ennemi, c'est une bonne chose, car cela prouve que nous avons tracé une ligne de démarcation bien nette entre l'ennemi et nous" (Mao Tsétoung, 1939)... sauf qu'il n'est de "ligne de démarcation" qui ne se puisse franchir : taxes ou pas, les "ennemis" commercent, échangent, négocient, construisent des rapports de force pour, si possible, s'éviter des guerres (là, on remonte de Mao à Sun Tzu...). C'est peut-être pour en avoir été incapable que Poutine a déclenché la sienne (la dernière, celle en cours) contre l'Ukraine, et parce qu'ils en sont capables qu'aujourd'hui, les Chinois sont devenus incontournables.
N'avons-nous pas écrit ce texte sur un ordinateur chinois ? En revanche, nous pouvons garantir que nous n'avons pas fait appel à DeepSeek pour vous l'infliger.
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