Budget de la Ville de Genève : le Conseil municipal fera son son boulot...

 

Hosannah

Le Conseil municipal de la Ville de Genève a, en deux votes, accepté lundi d'entrer en matière sur le deuxième projet de budget du Conseil administratif -la majorité de droite l'avait refusé sur le premier projet parce qu'elle considérait le déficit envisagé (62,1 millions) comme excessif, mais le Centre et le MCG ont accepté d'entrer en matière sur un projet envisageant un déficit plus important encore(69,3 millions), les prévisions cantonales plombant la Ville de 28 millions.  Le projet a ensuite été renvoyé, pour examen, débat, amendements à la commission des Finances et par la même majorité PS, Verts, Centre et MCG , contre une minorité PLR, UDC et Ensemble à Gauche-LUP. La droite de la droite a une nouvelle fois refusé de faire son travail, la gauche de la gauche se réduisant à un usage tribunicien assez convenu de sa présence dans le dernier parlement genevois où elle a réussi à rester. Un rôle où la vigueur rhétorique du discours ne sert parfois qu'à habiller l'impuissance politique de la posture. Le Conseil municipal va donc faire le travail pour lequel il a été élu. On s'abstiendra de l'en féliciter, puisqu'il est là pour ça. Quant au résultat de ce travail, on verra dans trois semaines ce qu'on en fera. Hosannah !

L'impôt : un débat de fond qu'on aurait tort de craindre

Le projet de budget de la Ville que la commission des Finances va se mettre à examiner (y compris ses membres dont les partis refusaient de l'étudier) se solde par un déficit de 69,3 millions de francs, soit 7,2 millions de plus que le précédent projet. 69,3 millions, c'est, à la louche, trois centimes additionnels et demi d'impôt (municipal) de plus. Ce qui plombe les finances municipales, ce sont les baisses des rentrées fiscales cantonales et les baisses d'impôts que le canton a imprudemment accordées aux plus aisés et aux plus fortunés (et aux entreprises). Des cadeaux qui feraient perdre 28 millions de revenus à la Ville. Et ont incité le Conseil administratif à proposer 21 millions de coupes budgétaires (un peu plus qu'un centime additionnel), dont la plus grande partie (12,3 millions) toucherait la fonction publique, avec le gel des mécanismes salariaux et le gel des postes vacants. Les institutions culturelles ayant touché plus d'un million de subventions en 2025 les verraient réduites de 2 % en 2026 (sauf le Grand Théâtre, l'OSR, la Fondation d'Art Dramatique et l'OCG, affectés d'une réduction moindre) -en revanche, 61 postes en équivalent plein-temps, dont 27 et demi dans le secteur de la petite enfance, pourraient être créés. Parallèlement au budget de fonctionnement, le plan d'investissement reste à 180 millions. 

On ne sait pas ce qui sortira de la Commission des Finances -et à vrai dire, on s'en moque un peu. On ne sait donc pas non plus ce qui sortira de la séance plénière à qui le projet de budget retouché par la commission sera soumis. Et de cela, on se moque un peu moins, parce que de cela va découler les décision qu'on aura à prendre. 

Si le budget sorti de la commission des finances devait être accepté par le Conseil municipal après que la droite ait opéré des coupes supplémentaires dans les engagements sociaux, culturels, environnementaux de la Ville, c'est la question du référendum qui se posera à la gauche. Un exercice qu'on connaît, qu'on a pratiqué à plusieurs reprises, et chaque fois avec succès, lorsque la droite était majoritaire au Conseil municipal (situation plus fréquente que celle d'une majorité de gauche). On rappellera en outre, qu'il est en tout temps possible au Conseil municipal de voter des dépenses (plus précisément : des autorisation de dépenses données au Conseil administratif) hors budget. Par exemple pour rétablir les mécanismes salariaux puisqu'il y a une majorité pour cela au Conseil municipal. 

Si le budget sorti de commission devait être refusé par le plénum, la Ville entamerait l'année budgétaire 2026 sous le régime des "douzièmes provisionnels", c'est-à-dire du budget 2025 découpé en autant de tranches mensuelles que nécessaires pour que, finalement, le Conseil municipal accepte un budget. Ou que le Conseil d'Etat impose à la Ville une augmentation de l'impôt municipal pour réduire le déficit à son maximum de 49 millions -ce qui serait à la fois amusant et frustrant : amusant, puisque au bout du compte la droite aurait provoqué ce qu'elle déteste le plus, une augmentation d'impôt, et frustrant parce que cette augmentation se ferait sans débat, et pour des motifs purement comptables (réduire le déficit) alors qu'elle devrait l'être pour une raison politique : financer les prestations de la Ville à la population... 

La question qui fâche reste donc bien celle de l'impôt municipal -les "centimes additionnels", dont chacun vaut (à la louche) 18 millions. Les augmenter de deux centimes en les faisant passer à 47,5 réduirait donc le déficit de 36 millions.  La droite, de toute évidence, par réflexe autant que par idéologie, s'empresserait alors de lancer un référendum contre cette augmentation d'un impôt progressif que sa clientèle électorale paie en fonction de ses revenus, comme nous lancerions un référendum contre un budget qui dégraderait les prestations sociales et les engagements culturels et environnementaux de la Ville. Les contribuables de la Ville habitant la Ville, y compris les étrangers, auraient alors, dans les deux cas, à se prononcer sur l'ensemble du budget. Sur le rôle des dépenses. Le rôle de l'impôt. Le rôle de la commune. 

Un vrai, bon, indispensable débat de fond qu'on aurait tort de craindre, et de grandes et fortes raisons de provoquer, si on le peut.

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